La sensation de s’asseoir dans sa voiture neuve et de sortir du concessionnaire pour entreprendre sa première balade est assez exaltante. Jusqu’au moment où on se rend compte que des options pour lesquelles on a déboursé des milliers de dollars sont absentes.
C’est exactement ce qu’une cliente de Volkswagen a vécu. Puisqu’elle souhaite maintenir de bonnes relations avec son concessionnaire, avec lequel elle est liée par contrat, je vais l’appeler Isabelle.
Après avoir pris possession de son nouveau Taos, Isabelle a découvert en roulant que des systèmes de sécurité tels que les « freins avant assistés avec freinage d’urgence autonome » et la « détection des angles morts avec avertissement de circulation » étaient manquants. Pourtant, elle avait payé plus de 5000 $ pour rouler dans la version Comfortline de ce modèle, qui inclut ces options parmi d’autres.
Isabelle contacte son vendeur. « Il m’a dit que les systèmes étaient censés être là, mais qu’ils ont manqué de pièces. Et que je ne suis pas la seule à qui ça arrive. Si on m’avait ajusté le prix, au moins… »
À force de réclamer un dédommagement, le concessionnaire a fini par lui dire qu’un rabais de quelques centaines de dollars lui avait déjà été consenti. Mais cet ajustement n’est pas inscrit au contrat et Isabelle n’a aucun souvenir d’une mise en garde verbale sur la possibilité de payer dans le beurre pour des options qu’elle juge très importantes puisqu’elles concernent la sécurité.
Ils espéraient quoi ? Que je ne m’en rende jamais compte ? C’est ce qui m’insulte le plus.
Isabelle
Ses démarches auprès de Volkswagen Canada n’ont guère été plus fructueuses.
Le constructeur lui a confirmé que des pénuries de pièces le forcent à « modifier temporairement la structure de l’offre de certains modèles » et que son site web contient une mise en garde à cet effet. « Les perturbations de la chaîne d’approvisionnement peuvent entraîner des changements dans la disponibilité d’équipement offert de série ou en option. Le [prix de détail] sera ajusté si un équipement spécifique n’est pas inclus », peut-on y lire.
Or, « un simple avertissement sur un site web n’est pas suffisant », affirme Charles Tanguay, porte-parole de l’Office de la protection du consommateur (OPC). L’avocat Jacques Castonguay, spécialiste du milieu automobile au cabinet ML Avocats, abonde dans le même sens. « Il n’y a pas d’obligation quand on achète d’aller voir le site web ! »
Quand un commerçant vend un véhicule qui ne correspond pas à sa description originelle, peu importe la raison, il commet des infractions à la Loi sur la protection du consommateur, rappelle Charles Tanguay. L’article 219 interdit la fausse représentation, tandis que l’obligation de conformité des biens relève des articles 40 et 41. En conséquence, « la consommatrice pourrait demander une diminution du prix ou l’annulation de la vente » au moyen d’une mise en demeure.
Me Castonguay suggère de prendre des recours à la fois contre le concessionnaire et le constructeur « pour qu’ils ne se renvoient pas la balle ».
Isabelle a l’intention de se battre pour une compensation financière puisqu’elle a besoin de sa voiture. Elle pourrait aussi demander au tribunal de lui accorder des dommages-intérêts punitifs, indique le représentant de l’OPC.
Ne faire aucune mention de l’absence de certaines options lors de la livraison du véhicule ou encore le fait de refuser d’accorder une réduction du prix de vente pourraient constituer des facteurs aggravants aux yeux d’un juge.
Jacques Castonguay, avocat spécialiste du milieu automobile au cabinet ML Avocats
Pour calculer la valeur des options manquantes, il est possible d’appeler l’Association pour la protection des automobilistes (APA) et le CAA.
La pénurie de semi-conducteurs et d’autres pièces perturbe aussi d’autres constructeurs automobiles.
Audi a réduit le nombre de caractéristiques de série sur ses voitures, a rapporté motor1.com. « Cela ne vous plaira peut-être pas, mais c’est actuellement le seul moyen pour un constructeur automobile d’assurer le flux des livraisons », a déclaré l’auteur.
Selon cette publication spécialisée, les véhicules amputés d’options sont identifiés par « un autocollant » et s’accompagnent « d’un crédit en espèces en fonction du nombre de caractéristiques supprimées ». Il peut s’agir du moniteur d’angle mort, du système de détection de collision arrière, du régulateur de vitesse adaptatif, de l’assistance au maintien dans la voie ou du socle de charge sans fil.
« Votre nouvelle BMW pourrait ne pas avoir d’écran tactile », avait par ailleurs titré le site edmunds.com à la fin de 2021. Début juillet, GM a précisé avoir en stock 95 000 véhicules construits sans certains éléments.
Pour éviter les frustrations et un éventuel litige aux petites créances, informez-vous auprès du concessionnaire des options qui risquent d’être manquantes et des compensations offertes, exigez des réponses écrites et soyez conscient de vos droits.
Gare aux voitures neuves… amputées | La Presse - La Presse
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